Comprendre le marché de l’énergie en France

De quoi est fait le prix de l’électricité ?

1. Production et Approvisionnement (35-40%)
– Coût de production (centrales nucléaires, énergies renouvelables…)
– Achats d’électricité sur les marchés européens

2. Acheminement (30-35%)
– Tarifs d’utilisation des réseaux publics (transport & distribution)
– Maintenance et modernisation des infrastructures

3. Taxes et Contributions (25-30%)
– TVA, Contribution au service public de l’électricité (CSPE), Taxes locales.

Pourquoi le prix varie-t-il ?

– Coût des matières premières (gaz, charbon…)
– Offre et demande sur les marchés européens
– Politiques énergétiques et environnementales

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Evolution du prix mensuel moyen de l’électricité sur le marché « spot » français

Le graphique ci-contre retrace les prix de l’électricité sur le marché de gros, où les fournisseurs s’approvisionnent, sur un horizon « spot », c’est-à-dire pour un achat (quasi) immédiat.

L’électricité peut être échangée soit de gré à gré, soit via des bourses organisées. Sur le marché français, Epex Spot est la plateforme de référence pour les échanges au comptant (marché spot), tandis que les contrats à terme se négocient sur l’European Energy Exchange (EEX). En 2024, le prix spot moyen de l’électricité livrée en France a marqué une chute spectaculaire par rapport au pic historique de 279,4 €/MWh en 2022, et se rapproche des niveaux pré-crise (autour de 50 € / MWh depuis 2011).

Photographie du TRV bleu
pour un client résidentiel moyen de 2010 à 2018

Ce graphique trace l’évolution du tarif de l’électricité entre 2010 et 2018.
Le tarif est formé par cumul de plusieurs composantes:

– la fourniture: le prix de l’électron, acheté sur les marchés de gros ou directement au producteur
– le tarif de réseau: le « TURPE » visant à rémunérer l’utilisation et l’entretien du réseau de distribution, auquel s’ajoute le tarif pour le réseau de transport
– les taxes: prélèvements reversés à l’Etat
– les éléments parafiscaux: obligations imposées par la loi ou la règlementation, tels que les CEE ou le mécanisme de capacité
A ces éléments s’ajoute l’inflation.

L’augmentation du tarif de l’électricité sur la période considérée est majoritairement liée à celle des taxes et de l’inflation.

De façon plus générale, la répartition classique de la facture à 1/3 fourniture, 1/3 réseaux, 1/3 taxes, est remise en cause dans le temps.
En effet, les composantes parafiscales et de réseau, combinées à l’inflation, modifient cet équilibre.

Evolution des prix de l’électricité et des prix à la consommation des ménages
de 1960 à 2016

Ce graphique illustre l’évolution du prix de l’électricité depuis 1960. Celui-ci est fluctuant dans le temps, dépendant grandement de facteurs exogènes.

Les deux lignes verticales correspondent respectivement au premier choc pétrolier de 1973 et au contre-choc de 1986.

La crise de 2022 – 2023 confirme que le prix de l’énergie n’est pas linéaires. En période normale, la concurrence vise à tirer ces prix vers le bas. En période de crise, des interventions publiques sont nécessaires.

Une spécificité française : l’ARENH

L’ARENH, ou « Accès Régulé à l’Électricité Nucléaire Historique », permet aux fournisseurs alternatifs de s’approvisionner en électricité à un prix régulé et fixé par les pouvoirs publics. Ce prix est aujourd’hui fixé à 42 €/MWh pour un volume global de 100 TWh/an répartis sur l’ensemble des fournisseurs alternatifs.

En place depuis le 1er juillet 2011 et jusqu’au 31 décembre 2025, ce mécanisme a été instauré par la loi NOME du 7 décembre 2010. En permettant aux fournisseurs d’acheter l’électricité produite par les centrales nucléaires historiques d’EDF à des conditions économiques équivalentes à celles d’EDF, le dispositif vise à distribuer équitablement le nucléaire historique amorti entre tous les consommateurs de l’Hexagone. Il permet par là-même de faire bénéficier de la rente nucléaire aux consommateurs de France, ainsi que le développement d’une concurrence sur le marché de l’énergie.

Avec la fin de l’ARENH, les consommateurs seront exposés à 100% des prix marché, puisque le nucléaire historique amorti sera directement vendu sur le marché de gros. Pour lui succéder, un dispositif dit de « Versement nucléaire universel » est prévu par le PLF 2025. Certains membres de l’Anode se sont d’ores et déjà prononcés publiquement pour la révision de ce dispositif – voir à ce titre la tribune.

La part des fournisseurs alternatifs sur le marché de l’énergie en France

Selon l’Observatoire des marchés de détail, publié par la Commission de régulation de l’énergie début 2025, les fournisseurs alternatifs détiennent environ 30% de parts de marché en électricité, et 45,6 % de parts de marché en gaz naturel auprès des consommateurs résidentiels.

58% des consommateurs résidentiels sont au tarif réglementé (tarif « bleu » EDF), et 11,6% ont choisi une offre de marché fournie par des fournisseurs historiques.
Pour les consommateurs « non résidentiels », en électricité, 3,7 millions de sites sur un total de 5,34 millions sont en offre de marché au 31 décembre 2024 (soit 69 %).

En gaz naturel, 60 % des sites, soit 378 000 sur un total de 633 000 sites, sont chez un fournisseur alternatif.

Quelques dates clés

1996 – 1998

Le Conseil et le Parlement européen adoptent 
le « premier paquet énergie » (directive 96/92/CE pour le marché intérieur de l’électricité, 
et directive 98/30/CE pour le marché intérieur 
du gaz naturel).

Novembre 2002

La Cour de justice des communautés européennes condamne la France pour manquement à son obligation de transposer la directive 98/30/CE relative aux règles communes pour le marché intérieur du gaz.

Août 2003

Le Conseil et le Parlement européen adoptent le « second paquet énergie » (directive 2003/54/CE pour le marché intérieur de l’électricité et directive 2003/55/CE pour le marché intérieur du gaz naturel). Il prévoit l’ouverture des marchés aux clients non résidentiels le 1er Juillet 2004, puis à l’ensemble des clients le 1er Juillet 2007.

Avril 2006

Bruxelles lance une procédure d’infraction contre la France, au motif que « l’organisation actuelle des tarifs réglementés bloque l’arrivée de nouveaux fournisseurs ».

Septembre 2006

Création de l’Association Nationale des Opérateurs Détaillants en Electricité (A.N.O.D.E).

Décembre 2006

L’A.N.O.D.E dépose une plainte auprès de la Commission Européenne pour non respect, par la France, de la directive 2003/54/CE fixant les règles applicables au marché intérieur de l’électricité.

Juin 2007

La Commission européenne lance une procédure d’infraction contre la France au titre de l’aide d’Etat que constitueraient les tarifs réglementés « verts » et « jaunes » ainsi que le Tarif Réglementé Transitoire d’Ajustement au Marché (TaRTAM).

24 Avril 2009

Publication du rapport de la Commission Champsaur. Elle préconise d’éliminer les tarifs réglementés de détail pour les entreprises, de les maintenir pour les ménages et d’introduire un tarif réglementé de gros pour l’électricité de base d’origine nucléaire. L’A.N.O.D.E approuve la recommandation de la Commission concernant la mise en place d’un droit d’accès à l’électricité de base. Elle appelle néanmoins le gouvernement à aller plus loin que le rapport et à développer la concurrence sur le segment du marché résidentiel et professionnel (Tarif Bleu).

Juillet – Août 2009

Le Conseil et le Parlement européen adoptent le « troisième paquet énergie » (directive 2009/72/CE pour le marché intérieur de l’électricité et directive 2009/73/CE pour le marché intérieur du gaz naturel), qui renforce la protection des consommateurs vulnérables et impose le déploiement des compteurs intelligents – au moins 80% des clients équipés d’ici 2020.

Avril 2010

Publication du « rapport Poignant-Sido ». Ce rapport préconise notamment de déployer le plus rapidement possible les compteurs intelligents et de développer les effacements de consommation. Sur la question des effacements de consommation, le rapport propose de développer les mesures alternatives au délestage, qui doit rester une mesure d’urgence. Il faut inciter les consommateurs à opter pour des contrats incluant des effacements de consommation.

Octobre 2010

L’Association Nationale des Opérateurs Détaillants en Electricité devient l’Association Nationale des Opérateurs Détaillants en Énergie.

25 Novembre 2010

Adoption de la loi portant Nouvelle Organisation du Marché de l’Electricité (NOME). Ses deux principaux objectifs sont de répondre aux litiges avec Bruxelles portant sur le défaut de transposition de la directive 2003/54/CE sur la libéralisation des marchés de l’électricité, et de maintenir des prix bas pour les consommateurs. Les fournisseurs alternatifs sont autorisés à racheter un quart de l’énergie nucléaire produite par EDF au tarif d’Accès Régulé au Nucléaire Historique (ARENH). Les tarifs réglementés sont pérennisés pour tous les ménages et petits consommateurs professionnels. Ils le sont également pour les consommateurs industriels qui en bénéficient aujourd’hui, et ce jusqu’en 2015. L’A.N.O.D.E salue l’adoption de la loi, mais attire l’attention du gouvernement sur la nécessité de fixer le prix de l’ARENH à un niveau qui soit cohérent avec le prix de la part du nucléaire que facture EDF dans les tarifs réglementés de vente, soit 35 €/MWh.

1er Janvier 2016

Disparition des tarifs réglementés pour les clients de puissance souscrite supérieure à 36 kVA.

Juillet 2017

Le Conseil d’Etat reconnaît que le maintien de tarifs réglementés du gaz naturel est contraire au droit de l’Union européenne.