A la veille de l’adoption de la loi climat, les fournisseurs d’électricité alternatifs mettent la pression pour obtenir une augmentation des volumes d’électricité nucléaire disponibles afin de concurrencer EDF. Sans cela, ils anticipent une hausse des prix de 4 %, contre 1 % seulement en cas de révision à la hausse.
Et si une nouvelle hausse des tarifs de l’électricité survenait dès 2020 ? C’est le scénario politiquement risqué que brandissent opportunément les fournisseurs d’électricité alternatifs à l’heure où le Sénat doit définitivement adopter la loi énergie climat jeudi. « Compte tenu du plafond actuel des volumes d’électricité nucléaire mis à disposition par EDF aux fournisseurs alternatifs et de la hausse des prix de marché, on risque d’avoir une augmentation de près de 4 % des tarifs d’électricité réglementés début 2020 », fait valoir aux « Echos » Naima Idir, la présidente de l’ANODE, association qui regroupe les principaux fournisseurs alternatifs. Selon nos informations, la Commission de régulation de l’énergie aurait déjà mis en garde les pouvoirs publics sur un tel risque.
Le gouvernement doit encore se prononcer
Après l’épisode de hausse massive des tarifs réglementés de l’électricité (+5,9 %), au 1er juin 2019, le sujet est suivi de près par le gouvernement. Dans la loi énergie climat, les parlementaires ont introduit une disposition permettant d’augmenter les volumes d’électricité nucléaire mis à disposition des acteurs afin de réduire le poids des prix de marché dans la facture du consommateur pour la stabiliser.
Mais pour les fournisseurs alternatifs, il n’est pas encore acquis que l’exécutif mette en oeuvre cette disposition dès les prochaines semaines. Or, le temps presse : « une hausse du plafond de l’Arenh (accès régulé à l’énergie nucléaire historique, NDLR) permettrait de limiter la hausse des tarifs à environ 1 %. Mais pour cela le gouvernement doit prendre un texte d’application avant mi-novembre – date à laquelle les fournisseurs alternatifs doivent soumettre leurs demandes d’électricité nucléaire d’EDF au régulateur. Or, jusqu’ici les signaux que nous avons ne sont guère positifs », pointe Naima Idir.
Des curseurs à calibrer avec Bruxelles
Au sein des pouvoirs publics, on fait valoir que les arbitrages ne sont pas rendus, d’autant que la loi n’est pas encore formellement adoptée. Le sujet est complexe car si l’exécutif veut limiter la hausse des prix qui s’annonce, il doit aussi faire face à la fronde d’EDF. L’énergéticien est très hostile à ce relèvement de plafond qui limite encore ses marges de manoeuvre pour valoriser sa production nucléaire. Aussi, dans la loi énergie climat, une autre disposition permet à l’exécutif d’augmenter le prix de l’Arenh, en parallèle d’une hausse de son plafond, afin de revaloriser la rémunération d’EDF qui n’a pas évolué depuis huit ans.
Le jeu d’équilibriste pour calibrer les curseurs et éviter, in fine, de plomber la facture des consommateurs est donc délicat. Il risque en outre de prendre du temps : pour toucher à ces mécanismes critiques sur le marché, Paris doit en effet recevoir l’aval de la direction générale de la concurrence à Bruxelles. « Associer hausse du plafond de l’Arenh, à une hausse du tarif risque de compliquer la tâche du gouvernement pour actionner rapidement un levier qui permettrait de limiter la hausse des prix de l’électricité », plaide encore la présidente de l’ANODE.
Sharon Wajsbrot
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